Exposition
On regarde une émission télé, a priori française, a priori un peu datée, des années 1980 peut-être. Sur le plateau se jouent des codes cathodiques qu’on qualifierait volontiers aujourd’hui de vintage avec son lot de cols roulés, de fond de scène neutres, d’écrans à balayage et de tables transparentes. Le tout dans une tonalité chromatique étrangement terne pour le petit écran, sorte de noir et blanc en couleur… Interrogé par un présentateur, un maître yogi américain présente un nouveau programme de communication réflexologique de son invention supposé révolutionner la nature des rapports entre êtres de conscience. A plusieurs reprises, le signal TV saute, glitch, comme sur une vieille VHS qui commence à fatiguer.
Et tout ceci de résumer assez bien l’approche d’Edouard Le Boulc’h quelque part entre sophistication, humour pince-sans-rire et sagacité.
Aussi sombre soit-il, il serait hasardeux de réduire son univers à une expression simple et appliquée d’une anxiété générationnelle. Toujours est-il que le jeune artiste appartient à la première génération qui n’aura pas connu le monde d’avant la révolution numérique – celle de l’accès à tout en quelques clics, de la communication dématérialisée, de l’immédiateté – et, de fait, à la première génération à se demander comment fonctionnait et ce qu’impliquait la communication avant.
Y aurait-il à voir une certaine nostalgie ? Une lucidité à toute épreuve, plutôt. Et à l’évidence, pour l’artiste, le passé et ses occurrences sont avant tout matière à éclairer le présent. Dans un monde qui, quarante ans après le cathartique Soleil vert (Richard Fleischer, 1974), propose des repas normés de substitution à notre alimentation variée, force est de lui donner raison.
Peripheral Feed est une partition fictionnelle à la fois visuelle et sonore. Une variation sur une certaine fin du monde…
Le film Affect TV, 2018 est réalisé en collaboration avec Antonin Gerson, Gwénaël Bodet et Isaac Foxsyth.
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