Exposition
Tour à tour peintre, sculpteur, organisateur d’expositions, pêcheur, Nicolas Rabant développe une pratique artistique atypique depuis plusieurs années. Né en 1988, il s’est installé à Brest afin de suivre les enseignements de l’école des beaux-arts tout autant que pour vivre près de l’océan. Il a créé un projet collectif singulier « Fishing with John » dont le titre est emprunté à une émission de télévision où des stars de cinéma s’exercent à la pêche. Nicolas Rabant procède de manière similaire en invitant des artistes à l’accompagner, canne à pêche en main, à participer à des cueillettes ou encore à l’aider à la conception de repas et de mets. Il en résulte des moments conviviaux et originaux, des expositions, des productions d’œuvres collectives et des concerts. Cette initiative est symptomatique de la démarche participative de Rabant ; il conçoit l’art dans une collaboration de tous les instants et se passionne pour le territoire qui l’entoure.
Pour son exposition à Passerelle, il emprunte les noms de ses chats disparus : Poussière et Paillette. Au-delà de toute référence kawaï, la genèse de ce titre témoigne de son attrait pour l’univers animalier et marque une sorte d’hommage entre révérence et second degré assumé. La fascination pour la faune se lit dans bon nombre de ses travaux dont ses sculptures. Se détachant de toute question morbide, cherchant davantage à figer une beauté éphémère, Nicolas Rabant congèle des animaux de consommation tels que des poissons qu’il a pêchés ou des bêtes sauvages qu’il a prélevées – déjà mortes – dans la nature, dans l’objectif de leur donner une nouvelle vie dans une œuvre. Tantôt méditation ou exercice physique, tantôt expérience collective généreuse, le moment de la récolte prend ainsi une place primordiale dans l’œuvre. À l’instar de certains artistes, notamment ceux du land art, l’action de se balader devient performance, acte créatif et, in fine, œuvre. Pour l’exposition de Passerelle, Rabant a choisi de présenter une série de seiches et un goéland qui viennent habiter l’espace, devenant de simples motifs visuels mais également des éléments narratifs.
Poussière & Paillette, c’est aussi un slogan de peinture. Les toiles montrées sur la coursive supérieure du centre d’art manifestent un goût pour ces matières, pour un rendu coloré cosmique très particulier difficilement photographiable. Les titres sont empruntés aux leurres bariolés pour la pêche d’un artisan « designer pour poissons ». Par cette réappropriation révérencieuse, l’artiste ouvre une réflexion sur les notions d’art fonctionnel et d’utilité de la peinture. En effet, les œuvres de Nicolas Rabant peuvent être vues comme des ornements voire des scénographies – elles interrogent largement le principe de « qu’est-ce qui est décoratif ? » – mais elles existent surtout comme des paysages, champ principal de recherche et d’expertise de l’artiste. Dans ses larges formats abstraits, il rejoue les canons de la représentation de la mer ou du ciel. Les images sont digérées, recouvertes, repeintes, et reproduites de manière obsessionnelle jusqu’à l’épuisement du motif. Apparaissant comme un objectif vain, l’exploration de Nicolas Rabant de ces sujets infinis n’arrivera certainement jamais.
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